Cadrage des
missions de coaching individuel en entreprise : quel équilibre entre
attendus des prescripteurs et déontologie des pratiques ?Fabienne Arrivetz avril 2016 Si la pratique du coaching se développe dans les
entreprises, il n’est pas pour autant certain que sa mise en œuvre se
construise et se perpétue de façon optimale en termes de déontologie tout
autant que d’efficacité. La question est d’autant plus importante qu’il en va
de la préservation d’un mode d’intervention spécifique tout comme de la
crédibilité plus globale du métier de coach en entreprise. Qu’en est-il aujourd’hui ? Il semble qu’une
certaine confusion règne en raison des logiques économiques (forte expansion de
la population de professionnels du coaching dans un contexte économique difficile),
de questions sociétales pour les entreprises (RPS et RS) générant de nouveaux
besoins, et plus généralement de niveaux de connaissance très variables de la
pratique du coaching professionnel pour les prescripteurs comme pour les
praticiens. Il ne s’agit pas là de faire un procès d’intention de l’une ou
l’autre des parties mais de comprendre en quoi des méconnaissances vont
influencer l’efficacité des interventions et pourraient à terme soit installer
des pratiques inadéquates soit favoriser un rejet de la pratique. Bien sûr la plupart des grandes entreprises qui
prescrivent des coachings depuis plusieurs années, en ayant pour certaines construit
un service de coachs internes, ont une vision pertinente de ses usages et
finalités, savent référencer des professionnels selon des critères exigeants,
et considèrent avec lucidité la part de responsabilité de chacun. Il est donc surtout question des entreprises moins
aguerries, qui aspirent à intégrer le coaching, ou qui l’ont récemment intégré
sans avoir disposé d’une information suffisante. De ces disparités de connaissances ou de pratiques
résultent notamment des variantes dans le cadrage des missions pouvant
signifier une mauvaise compréhension de l’enjeu majeur que cette dimension constitue.
Il en va pour exemple des appels d’offres qui illustrent parfaitement le manque
d’homogénéité des représentations et des attendus, depuis le profil des coachs
recherchés jusqu’à l’évaluation des résultats. Et bien sûr le surdéveloppement
des formations au métier de coach vient encore renforcer la confusion pour les néophytes,
parfois sous l’influence de professionnels peu scrupuleux. D’ailleurs comment expliquer qu’un coach sera
référencé dans une entreprise et ne le sera pas dans une autre équivalente
? question de tarif ? de profil ? d’outils ? de vision de la
pratique ? La représentation qu’un prescripteur a des pratiques du
coaching en lien avec la finalité qu’il souhaite ou pense lui donner tend à
conditionner la structuration de l'intervention du coach. Notre rôle est donc d’expliquer
en quoi certains cadrages compromettent la dimension éthique de nos prestations
ainsi que leur efficacité, et que notre souhait est de satisfaire et le coaché
et l’entreprise, en lien avec les objectifs partagés. Alors si pour répondre à
une demande, nous pouvons envisager certains ajustements en concertation avec
l’entreprise, un cadrage inadéquat imposé au coach peut conduire à son
instrumentalisation. Il perd alors la neutralité indispensable, notamment dans
la relation avec le coaché, induisant ainsi un accompagnement au mieux
inopérant et au pire dommageable pour le coaché, et plus trivialement un
investissement financier inutile. Car c’est bien la pertinence du processus
d’intervention en conscience de ce qu’il a de protecteur et de constructif qui augure
une collaboration efficace entre le coach, le coaché, et l’entreprise. Pour exemples voici un florilège non exhaustif de cadrages
proposés par des entreprises (certaines
s’en défendant pour l’avoir construit avec un cabinet de coachs …) :
coaching imposé sans concertation avec le coaché, absence d’entretien
exploratoire entre le coaché et le coach, le coach vient dans l’entreprise afin
que le coaché ne perde pas de temps en déplacements, un bilan intermédiaire
avec le N+ en l’absence du coaché, un rapport écrit concernant le contenu des
séances en guise de bilan de coaching, des objectifs cachés au coaché comme par
exemple "le coaching de la dernière chance" ou des objectifs non
partagés avec le coaché, un nombre d’entretiens figé sans prise en compte des
spécificités de chaque besoin, l’obligation d’élaborer une convention de
formation pour que le coût passe sur le budget formation, etc… Il existe pourtant un repérage explicite de nos processus
d’intervention en lien avec les codes de déontologie existants dont celui de la
SF Coach que sont : une responsabilisation du coaché quant aux objectifs
attendus (il s’engage dans cette démarche en conscience du contexte, de ses
enjeux et de ceux de ses responsables), la confidentialité du contenu des
séances de travail, l’autonomie du coaché, la responsabilité des prescripteurs
(le coaching s’ajoute à ce qui est fait pour la personne dans l’entreprise mais
ne se substitue pas à celle-ci), la neutralité du coach (il ne détient pas d’informations
secrètes sur le coaché), un financement spécifique (le coaching n’est pas de la formation et ne
peut faire l’objet d’une convention de formation), etc. Le coaching professionnel, pratique nourrie
d’expertises et d’expériences, est un réel levier de croissance des acteurs de
l’entreprise, de la responsabilisation, de l’évolution managériale. Souhaitons que les professionnels du coaching en
entreprise tout comme les entreprises elle-même, ne cèdent pas aux dérives de
ce mode d’intervention, et que chacun veille à perpétrer la qualité et le
professionnalisme en conscience de ce qu’est ou n’est pas le coaching, ses
principes, ses limites, ses richesses.
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